Articles

Allons au Calvaire, considérons attentivement ce qui s’y passe

Nous voici arrivés aux jours salutaires où l’on érigera le Calvaire dans tous nos temples, où nous verrons couler les ruisseaux de sang de toutes les plaies du Fils de Dieu ; l’Eglise représentera si vivement par ses chants, par ses paroles et par ses mystères, celui de la passion douloureuse, qu’il n’y aura aucun de ses enfants auquel nous ne puissions dire ce que l’Apôtre a dit aux Calâtes, que Jésus-Christ a été crucifié devant ses yeux. Parmi ces spectacles de mort et de croix, le chrétien sera bien dur, s’il ne suspend du moins quelques jours ce tendre amour des plaisirs, pour se rendre capable d’entendre combien les douleurs de Jésus lui doivent rendre considérable l’amour des souffrances  .

calvaire

Servons-nous de ce temps propice, prenons cette occasion favorable pour imprimer dans le cœur des chrétiens le véritable esprit du christianisme. L’Eglise commente aujourd’hui à lire dans les saints mystères l’histoire de la passion ; commençons aussi dès ce premier jour à nous en remplir tellement l’esprit, que nous en ayons toujours la pensée présente durant cette sainte semaine, et qu’elle nous inspire des sentiments qui soient dignes de chrétiens. C’est ce que j’espère. Messieurs, s’il plaît à Dieu de nous éclairer des lumières de Jésus-Christ, par l’intercession de Marie. Ave.

Dans les paroles que j’ai rapportées pour servir de sujet à ce discours, vous aurez remarqué, Messieurs, que saint Paul nous propose un combat auquel nous devons courir par la patience ; et en même temps il nous avertit de jeter les yeux sur Jésus, l’auteur et le consommateur de notre foi, c’est-à-dire qui l’inspire et qui la couronne, qui la commence et qui la consomme, qui en pose le fondement et qui lui donne sa perfection. Ce combat dont parle l’Apôtre, est celui que nous devons soutenir contre les afflictions que Dieu nous envoie ; et pour apprendre l’ordre d’un combat où se décide la cause de notre salut, l’Apôtre nous exhorte de la part de Dieu à regarder Jésus-Christ, mais Jésus-Christ attaché en croix. Car c’est là qu’il veut arrêter nos yeux, et il s’en explique lui-même par ces paroles : « Jetez, dit-il, les yeux sur Jésus qui s’étant proposé la joie, a soutenu la mort de la croix, après avoir méprisé la confusion : » Qui proposito sibi gaudio sustinuit crucem, confusione contemptà (Hebr., XII, 2).

Suivons son conseil, allons au Calvaire, considérons attentivement ce qui s’y passe.De là nous devons conclure que pour apprendre l’ordre, la conduite, les lois en un mot de ce combat de la patience, l’école c’est le Calvaire, le maître c’est Jésus-Christ crucifié. C’est laque nous renvoie le divin Apôtre.

Le grand objet, chrétiens, qui s’y présente d’abord à la vue,  c’est le supplice de trois domines. Voici un mystère admirable :

« Nous voyons, dit saint Augustin , trois hommes attachés à la croix : un qui donne le salut, un qui le reçoit, un qui le perd » In cruce tres homines : unus salvator, alius salvandus, alius damnandus (Serm., II in Psal. XXXIV, n. 1.).

Au milieu l’auteur de la grâce; d’un côté un qui en profite, de l’autre côté un qui la rejette. Au milieu le modèle et l’original; d’un côté un imitateur fidèle, et de l’autre un rebelle et un adversaire sacrilège. Un juste, un pécheur pénitent, et un pécheur endurci.

  • Un juste souffre volontairement, et il mérite par ses souffrances le salut de tous les coupables ;
  • un pécheur souffre avec soumission et se convertit, et il reçoit sur la croix l’assurance du paradis ;
  • un pécheur souffre comme un rebelle, et il commence son enfer dès cette vie.

Apprenons aujourd’hui, Messieurs, apprenons de ces trois patients, dont la cause est si différente, trois vérités capitales.

  • Contemplons dans le patient qui souffre étant juste, la nécessité de souffrir imposée à tous les coupables ;
  • apprenons du patient qui se convertit l’utilité des souffrances portées avec soumission;
  • voyons dans le patient endurci la marque certaine de réprobation dans ceux qui souffrent en opiniâtre.

Et comme ces trois vérités enferment, si je ne me trompe, toute la doctrine chrétienne touchant les souffrances.

Mgr Bossuet, second sermon pour le dimanche des Rameaux, sur la nécessité des souffrances (toute l’homélie ici)

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *